Mrs Dolly Diangelis
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Dolly avait rencontré Zeus DiAngelis à une soirée mondaine. Son visage lui était familier ; elle l'avait déjà entrevu lors de ses représentations mais jamais ils ne s'étaient adressé la parole. Lorsqu'ils furent enfin officiellement présentés, elle fut immédiatement charmée par l'assurance qui émanait de cet homme, son aîné de quelques années. Il s'exprimait avec aisance et se complaisait autant qu'elle d'être au centre de l'attention. Sociable et enjoué, charmant était le mot qui lui venait aisément à l'esprit lorsqu'elle pensait à lui. Si elle s'était montré joueuse mais sage envers ses autres prétendants, celui-ci semblait différent. Il était si assuré qu'il refusait même le moindre refus et insistait encore et encore jusqu'à ce qu'elle ne cède. Charmé par la jeune femme, il l'invita à de multiples reprises pour prendre une tasse de thé ou simplement se balader dans le parc. Il la couvrait de cadeaux en tout genre : des bijoux splendides, un petit chien même, des robes grandioses et même un piano. Elle n'hésita pas. Elle pensait à son futur, constamment ; elle n'était pas amoureuse de lui, pas vraiment, mais elle pensait qu'elle serait en sécurité à ses côtés. Il la protégerait et elle pourrait agir comme bon lui semblait. Le mariage, à ses yeux, n'avait rien de romantique, c'était une alliance, un contrat pécuniaire. Ce qui comptait à ses yeux était de trouver quelqu'un d'aussi charmant et fortuné que Zeus, quelqu'un qui l'accepterait et qui pourrait payer pour son train de vie.
La nouvelle de leurs fiançailles, selon trois semaines après leur rencontre, causa un certain émoi qui la laissa indifférente ; elle avait ce qu'elle voulait : un avenir assuré, sans peur du lendemain. Leur mariage fut grandiose, aucun autre mot n'aurait pu mieux le décrire. Loin de la modestie, des centaines d'invités furent conviés, des gens qu'elle ne connaissait pas. A l'aise dans toute situation, Dolly se réjouit simplement d'être le centre de l'attention, de tous ces regards, inconnus ou non, qui la suivirent lorsqu'elle arriva avec sa superbe robe blanche incrustée de diamants qui brillaient de milles feux. Ce jour-là, elle avait eu l'impression d'être une Reine. Elle avait gardé son calme et un sourire à toutes épreuves. Un pincement au coeur la saisit lorsqu'elle prononça "je le veux", consciente qu'un chapitre de sa vie était officiellement terminé. Elle était cependant optimiste quant à l'avenir, s'imaginant déjà donner de splendides soirées dans son glorieux manoir.
Mother says there are locked rooms inside all women ; kitchen of lust,
bedroom of grief, bathroom of apathy
Sometimes the men - they come with keys
and sometimes the men - they come with hammers
Les rêves de Dolly, si grands et pleins de promesses, fanèrent avec lenteur, un peu plus chaque jour. Un mot, un geste impatient de Zeus qui, dans leur foyer, commençait peu à peu à montrer son véritable visage. D'homme charmant et posé, il devenait irritable, que cela soit avec elle ou avec les serviteurs qui savaient disparaître dès que son humeur devenait orageuse. La première fois qu'il lui hurla dessus, elle fut trop surprise pour réagir, trop choquée pour rétorquer. Il s'excusa en suite, alors elle se dit que ce n'était pas grave, puisqu'il était désolé. Elle pardonna et passa à autre chose. L'alcool n'aidait pas : il devenait violent et ne lui laissait aucun choix quant à leurs rapports conjugaux. Elle n'osa pas en parler ; elle se disait que c'était normal, que c'était l'alcool. Et puis, il s'excusait toujours, après. Il s'en voulait terriblement, alors elle le rassurait. Elle n'avait jamais été amoureuse de lui, mais ressentait une affection certaine qui, au fur du temps, se transforma en terreur. Elle qui avait toujours proclamé haut et fort ce qu'elle ressentait se faisait aussi silencieuse qu'une ombre. Elle n'écrivait plus à sa famille, qu'elle n'avait pas vu depuis le mariage. Elle n'aimait pas les amis de Zeus, mais n'osa jamais rien dire là-dessus. Lorsqu'elle voulu reprendre ses entraînements, il lui rit au nez, l'embrassant avant de partir sans rien ajouté. Elle passait ses journées dans son immense demeure, avec pour seule compagnie des serviteurs trop effrayés pour lui adresser la parole. Elle jouait du piano, parfois. Les soirées mondaines ne lui apportaient plus la moindre joie ; Zeus les passait, soûl, à courtiser d'autres femmes devant le regard embué d'humiliation de son épouse.
Mais tout changea lorsque Dolly la rencontra. Elle frappa à sa porte alors que Dolly était seule. Elle la laissa entrée, intriguée ; la femme était brune, d'une beauté certaine mais paraissait complètement perdue. Elle la réconforta, sans véritablement comprendre ce qu'elle lui disait ; elle lui parlait de chute, d'ailes, d'épée. Elle lui dit s'appeler Alex ; Dolly supposa qu'il s'agissait sans doute d'un surnom mais n'insista pas, elle se contenta de lui tenir la main jusqu'à ce qu'elle se calme. Sans la moindre hésitation, Dolly lui offrit de rester aussi longtemps qu'elle le souhaitait. Lorsque Zeus rentra le soir, elle déclara simplement que son amie du ballet resterait à cause de problèmes personnels ; Zeus ne paru pas enchanté mais garda le silence. Il fit part de sa désapprobation le soir, lorsqu'ils ne furent plus que tous les deux. Le lendemain, Dolly ne trouva pas la force de se lever. Elle entendit une voix, à travers l'épaisse porte, et elle invita Alex à entrer. Cette dernière ne prononça pas une parole, elle se contenta de s'asseoir à ses côtés et de prendre sa main. Dès lors, et pour la première fois, Dolly comprit la signification du mot "aimer". Elle qui l'avait confondu avec adoration, avec soumission, avec jeu, elle comprenait maintenant, lorsqu'elle croisait le regard d'Alex Aux yeux du monde, elles étaient deux amies proches, comme des soeurs. Mais dès qu'elles se retrouvaient seules, elles se sentaient pleinement en sécurité ; entières. A ses côtés, Dolly arrivait à ne plus penser aux sévices que lui faisait subir son époux.
